Fort peu enseigné en club, ce travail est pourtant idéal lorsque vous disposez de peu de temps, par exemple les soirs d’hiver. En effet, la préparation du cheval comme le rangement du matériel sont très écourtés, et la séance elle-même ne durera que 15 mn (cheval a remettre en route, poulain) à 30 mn (cheval expérimenté) selon les cas.
Une séance de longe plus longue est rarement productive ; et se borne souvent à redemander les mêmes exercices, ce qui blase le cheval.
Ce que doit être une séance de longe :
- une séance d’assouplissement
- une séance de musculation douce
- une séance d’éducation à la voix et d’obéissance
- une séance courte et productive
- une séance avec un objectif précis correspondant aux lacunes du cheval
- une séance avec des exercices construits selon les lacunes et les capacités du cheval
Ce que ne doit pas être une séance de longe :
- une séance de course à pied pour le longeur
- une séance de défoulement hystérique pour le cheval
- une séance où le cheval apprend à résister discrètement aux ordres
- une séance décousue, sans but
- une séance longue et lassante pour le couple : 30 tours au trot ininterrompu par ex
- une séance trop dure physiquement et moralement pour le cheval
- une succession d’exercices mal choisis, mal demandés….
- une séance de mise en souffle : ça se fait en extérieur ça !
Matériel requis :
-un caveçon non violent, ou un filet en caoutchouc (aiguilles ou verdun ou rondelles) ou un licol (sauf si le cheval, au fil des séances, apprend à tirer dessus…)
-une longe à tourner en bon état avec un mousqueton pas trop lourd mais solide. Longer avec une ficelle ou des rênes nouées est une folie.
-une chambrière ou un fouet d’attelage ou un carrot stick
-des gants si le cheval tire
-des protections si le cheval se touche ou connaît peu ce travail
Un surfaix et un enrênement n’ont rien d’indispensable à une bonne séance. Ils sont souvent contre productif car mal choisis ou mal réglés. Attention ! Un placer d’apparence juste obtenu en force sur un enrênement entraîne forcément un travail dans la crispation. Ce qui veut dire que :
-votre cheval ne va pas s’assouplir
-votre cheval peut basculer sur les épaules sans que ça vous semble évident
-votre cheval peut se faire une contracture, et à long terme souffrir d’arthrose cervicale…
-votre cheval peut paradoxalement développer des muscles antagonistes à ceux souhaités
-votre cheval peut se défendre, parfois avec violence et aller à l’accident
-votre cheval va redouter ces séances…et résister encore plus dans la majorité des cas.
Le tout peut finir par nécessiter la venue du vétérinaire ou de l’ostéopathe.
Si vous utilisez un enrênement, retenez que :
-il ne doit JAMAIS être mis en place avant la fin de la détente. Encore moins à l’attache.
-il doit être retiré en fin de séance pour laisser le cheval se détendre
-il doit être réglé très lâche au début et raccourci sur plusieurs séances
-il doit être choisi intelligemment : forcer l’encolure à se casser ou à reculer n’engage pas les postérieurs et ne fait pas travailler le dos correctement ; c’est l’inverse !
-il ne doit être qu’un passage, jamais un but. Il faut travailler pour s’en passer.
En général, un travail progressif avec une main douce et basse permet d’éduquer le cheval bien mieux que n’importe quel enrênement, aussi cher soit il. Tout simplement car cela fait appel à l’intelligence du cheval….
Le lieu choisi pour longer pourra être :
-un rond de longe ; car il encadre bien le cheval, facilite l’incurvation et évite que le cheval n’apprenne à tirer vers l’extérieur
-une carrière ; car elle permet de faire des exercices plus variés en se déplaçant ponctuellement sur des lignes droites.
-un lieu libre et ouvert ; à réserver aux longeurs expérimentés avec des chevaux éduqués. Pas d’intérêt particulier, sauf peut être si le lieu choisi incite à la déconcentration.
Longe élémentaire :
Sur un grand cercle
Ce travail consistera à marcher votre cheval au pas pour l’échauffer pendant 5 minutes, aux 2 mains. Ce pas devra être actif. En fin d’échauffement commencez à demander des transitions vers l’arrêt et le trot.
Le travail au trot sera demandé aux 2 mains aussi, avec des transitions vers le pas. La transition directe vers l’arrêt est un exercice de niveau supérieur, à demander de façon progressive depuis un trot rassemblé. N’acceptez pas que votre cheval « courre » dans le trot ; les variations dans l’allure doivent être de qualité et il faut que le cheval se maintienne seul durant 3 à 4 tours avant de redemander quelque chose.
La transition au galop sera abordée dès que le cheval obéira parfaitement au trot sans précipiter lors des allongements et en restant dans la juste incurvation (pas de tête ou de croupe vers l’extérieur). Ce sont surtout les départs qui seront importants, ainsi que la capacité à galoper quelques tours sans se désunir ni accélérer ou tirer. Attention ! Apprenez à bien reconnaître le galop désuni, qui est fréquent dans ce contexte sur les chevaux raides.
Le cheval ne doit pas chauffer et partir de façon intempestive ou devenir inarrêtable.
Le départ au galop peut nécessiter dans un premier temps un placer vers l’extérieur ; tolérable si vous faites en sorte de l’améliorer. Dans ce cas avancez un peu votre main au moment opportun. Dans le galop le cheval doit avoir la tête droite.
Le départ est plus facile parfois depuis l’arrêt ou le pas que depuis le trot ; c’est assez logique en fait. Si votre cheval a tendance à vous embarquer dans un grand trot sans fin, tentez donc un départ depuis l’allure inférieure. Quoi qu’il arrive il ne faut pas tolérer longtemps le trot allongé pour un départ au galop. Juste le temps que le cheval comprenne ce qu’on attend de lui à l’ordre « galop ». Aidez à l’affaire en faisant 2 ou 3 pas très énergiques et en agitant la chambrière si ça ne suffit encore pas.
La transition descendante vers le trot doit se faire de façon propre, sur un trot moyen au plus et l’obtention du pas ensuite doit être facile. C’est loin d’être évident !
On aura le contrôle du cheval lorsqu’il sera capable de transitionner du galop vers l’arrêt en 5 foulées au plus, dont une ou 2 de pas.
Le cheval sera détendu lorsqu’on le verra de lui-même allonger l’encolure, puis s’étendre vers le sol aux 3 allures lors de la détente : il étire son dos et c’est un bon signe.
Durant toute cette période de longe élémentaire, on travaille le respect du cheval, qui ne vous botte ni ne vous agresse ; qui ne part pas en coups de cul ou en cabrer. On peut tolérer un très bref et léger moment de joie par exemple au premier galop, mais en aucun cas une succession de figures de style : on est là pour bosser, pas pour jouer !
Le cheval chaud devrait à mon sens être détendu en liberté seul dans un grand espace clôt ; et non pas « au travail » avec un humain présent. Ceci dit un cheval suffisamment sortit et « bien dans sa tête » n’est pas chaud ! Si votre cheval vous gratifie donc régulièrement de démonstrations exotiques, mieux vaut revoir ses conditions de vie (paddock tous les jours ?) et son alimentation.
On s’applique à obtenir un cheval incurvé de la tête aux hanches et à l’encolure dans le bon sens (ce qui ne veut pas dire forcément »ramenée »), sans le secours d’enrênements.
On cherche à développer des variations propres dans l’allures et de belles transitions ; ainsi qu’une parfaite obéissance à la voix en choisissant des mots simples : « marche ! », « trotte ! », « galop ! » ; « hooo là », « doucement », « allonge »…par exemple.
Si l’obéissance n’est pas suffisante, on sanctionne dans la seconde suivante avec la chambrière, la longe ou sa propre position. Ne jamais répéter l’ordre plusieurs fois avant de sévir, cela incite le cheval a obéir avec lenteur ou pas du tout.
Le longeur devra garder sa place centrale ; sans pour autant être un piquet raide. Il n’est pas interdit ponctuellement d’accompagner un peu le cheval (départ au galop) ou de barrer la route devant lui pour exiger un arrêt qui ne vient pas.
Il devra faire attention à ne pas enrouler la longe dans sa main, ni passer les doigts dans une éventuelle poignée. La chambrière sera tenue neutre ; et les mains basses et souples tant que rien ne justifie une sanction.
Celle qui tient la longe devra être très juste ; sans chercher à tendre fortement la longe mais en veillant à ne pas la laisser traîner. Ce travail demande de la concentration ; ce n’est pas la récréation pour vous non plus. En fin de séance, pensez que vous ne faites pas grand-chose de physique, mais votre cheval oui, alors n’abusez pas de sa bonne volonté. L’incurvation quasi permanente exigée par un bon travail en longe est très dure pour votre cheval même au pas !
Quelques exercices possibles :
Je sais qu’en général en club on n‘enseigne guère la longe…alors enseigner en plus des exercices en dehors du « tourner en rond aux 3 allures avec des élastiques… ». Voici quelques idées faciles.
-barre au sol
Idéale pour canaliser un cheval qui chauffe, concentrer un étourdi ou encore obliger un négligeant à se porter.
Placer une voire plusieurs (si vous savez régler la distance !) barre(s) au sol ; et faites passer le cheval dessus au pas puis, si tout va bien, au trot. Vous pouvez ensuite sur élever la barre de 10 cm maxi ; pour accentuer encore son effet. Notamment pour un cheval qui se néglige. Attention, le cheval ne doit pas sauter mais enjamber proprement, dans la foulée, sans dévier, ralentir ou quoi que ce soit. Vous devez rapidement avoir une sensation de cadencement, de réflexion dans le geste ; de rythme sans précipitation ou désordre.
Le travail au galop est possible, mais a réserver aux chevaux déjà bien avancés.
-Variations de cercle et allongements
Travail idéal aussi pour les chevaux qui sont trop sur les épaules, se laissent emporter, ne s’incurvent pas par raideur….
Dans une carrière ; commencez par un cercle moyen. Puis, laissez filer la longe et aidez vous si besoin de la chambrière aux sangles pour faire agrandir le cercle au cheval ; en gardant cadence et amplitude. Ensuite ; prenez le grand côté dans l’allongement (courrez si besoin !!)quelques foulées. L’allongement est propre, dans le calme et le cheval en profite pour se détendre s’il est raide. Demandez le ralentissement, comptez 2 foulées maxi et faites revenir sur un cercle en ayant main assez basse et dirigée vers de centre du cercle (forme de rêne d’ouverture) mais sans tirer. Usez de votre langage corporel pour aider votre cheval à exécuter ; en vous décalant un peu en avance. Si le cheval n’a pas rassemblé son allure, il s’auto sanctionne par un virage difficile et une tension sur la longe.
Le cheval étant revenu sur un grand cercle dans une allure de travail ; demandez lui de raccourcir le cercle de façon progressive. Faites un pallier et passez en allure plus rassemblée, avec du rythme mais pas de vitesse (on ne dort pas). Continuez à demander le raccourcissement du cercle jusqu’au minimum. Ne causez pas de résistance et de raideur ; le cheval doit être incurvé donc c’est difficile (veillez à mettre la chambrière aux sangles si le cheval contourne l’exercice en virant à plat, et restez sur un cercle accessible à son niveau). Faites un à 3 tours selon l’exigence du diamètre ; puis de nouveau revenez lentement au cercle normal et redemandez l’allure de travail.
Travail a commencer au pas pour que le cheval comprenne bien la grande longueur qui se termine par un cercle. Puis au trot. Au galop….si vous courrez vite !
Cet exercice peut se combiner avec le précédent, vous sortez du cercle avec la barre au sol pour faire votre allongement sur la longueur.
-Les variations d’allure rapprochées
Idéales pour le cheval qui ne vous écoute pas ; cet exercice sera utilement placé en début de séance, dès la détente. Il faut être rigoureux si vous voulez qu’il porte ses fruits : chambrière qui s’approche dès que l’allongement se fait attendre ; qui se place devant le cheval si c’est le ralentissement qui pêche. Au besoin donnez de votre personne en bougeant nettement.
Sur un cercle assez grand mais vous donnant possibilité de toucher le cheval avec votre chambrière.
Prenez le pas ; actif.
Demandez au bout de quelques foulées un arrêt de 5 secondes. Puis de nouveau le pas moyen quelques foulées (5 à 6 maxi). Puis un petit allongement. Puis un arrêt…..
L’intervalle entre chaque demande ne doit pas excéder 10 foulées environ, idéalement 5. Il ne doit pas y avoir de suite logique dans vos demandes pour que le cheval ne les anticipe pas.
Dès que ce sera acquis au pas, il est possible de combiner pas, trot et arrêts sur l’exercice. Ne demandez cependant que des transitions que le cheval donne facilement. Ici le but est de le rendre réactif, pas d’améliorer son équilibre.
Ce travail demande une très forte concentration au cheval, aussi il ne doit pas durer longtemps et se terminer par un moment de pas ou de trot sans demande particulière si ce n’est le travail juste.
Notez que même si ce n’est pas le but premier, ce travail est bénéfique pour l’équilibre du cheval, et l’engagement d’autant plus que vous deviendrez exigeant dans la justesse du travail.
Le travail au galop sur cet exercice n’est utile que pour un cheval qui aurait tendance à embarquer et devra être progressif.
Comme vous le voyez on peut faire pas mal de choses et contribuer à régler bien des problèmes à la longe. Bien mené, ce n’est pas un exercice abêtissant contrairement à ce que certains disent. Néanmoins, comme souvent avec le travail en lieu fermé, le cheval d’extérieur appréciera de ne pas faire que cela toute la semaine ! Aussi, une séance par quinzaine (en alternance avec un autre travail à la même finalité) me semble suffisante pour le cheval de loisir adulte et en état.
Quel que soit le profil du cheval, enchaîner 3 séances de longe identiques d’affilée me semble un bon moyen de rendre l’animal éteint, blasé et finalement peu productif. Même si vous ne pouvez pas monter, pensez donc à alterner longe avec longues rênes, travail en liberté, en main, en extérieur comme en carrière.
A ce sujet, retenez bien que vous pouvez combiner plusieurs outils sur une même séance, sans toutefois dépasser 40 mn de travail : longues rênes au pas et au trot puis longe pour le galop ; longe puis travail en main pour les jeux éthologiques….